Daphnis et Chloé, ballet en trois parties

Ravel

1875 – 1937

« L’une des plus belles œuvres de la musique française » Igor Stravinski, à propos de Daphnis et Chloé

Du poème pastoral Les Amours de Daphnis et Chl de Longus, poète grec (IIe siècle), Ravel a tiré une vaste fresque panthéiste à saveur mythologique illustrant les amours du berger Daphnis et de la bergère Chloé, ainsi que les épreuves qu’ils subissent avant de connaître enfin le bonheur.

Dans sa version intégrale, le ballet se présente comme une sorte de symphonie en trois parties pour orchestre et chœur. D’une durée d’environ une heure, il s’agit de l’œuvre la plus longue de Ravel. Daphnis et Chloé a été créé à Paris en 1912 par les célèbres Ballets russes de Sergei Diaghilev dans une chorégraphie de Michel Fokine avec le grand Vaslav Nijinski dans le rôle de Daphnis. Les magnifiques décors et costumes étaient de Léon Bakst.

Au-delà des amours et aventures de Daphnis et Chloé, ce sont surtout les forces de la nature qui sont célébrées dans cette somptueuse partition. Ravel évoque avec bonheur les frémissements de la forêt de l’île de Lesbos où se déroule l’action, le lever du jour, les chants des oiseaux ainsi que les chuchotements puis les grondements du vent. Il y utilise les voix humaines comme des instruments de musique, c’est-à-dire sans paroles, en vocalises. Ces voix représentent ainsi le souffle même de la vie omniprésente. Il fait aussi appel à l’éoliphone ou « machine à vent », accessoire bruiteur qui permet d’imiter à merveille le bruit du vent et d’en contrôler précisément l’intensité sonore. L’orchestre de Daphnis et Chloé inclut également la rare flûte alto au remarquable timbre feutré, ansi que deux harpes et une abondante percussion.

Un grand nombre de passages de Daphnis et Chloé sont mémorables. Signalons entre autres l’inoubliable introduction qui semble évoquer quelque début du monde; le Lever du jour qui nous plonge au cœur d’une forêt qui s’éveille, avec les premiers rayons du soleil et l’appel des oiseaux; les captivants solos instrumentaux, notamment de hautbois et de flûte; les nombreuses danses si diverses, tour à tour amoureuses, cocasses, hypnotiques, langoureuses, guerrières. La spectaculaire Bacchanale finalement, sur un rythme proche de celui de la tarentelle, conclut le chef-d’œuvre dans un crescendo typiquement ravélien, à la fois extatique et frénétique.

© Claudio Ricignuolo 2022