Symphonie nᵒ 3 en do mineur
Florence Price
1887 – 1953
La renommée actuelle de Florence Price a connu son coup d’envoi en 2009 lors de la découverte d’un nombre considérable de ses manuscrits musicaux dans une maison de campagne abandonnée, près de Chicago, qui lui a appartenu. Malgré une prolifique carrière, elle était tombée dans un oubli presque total. Née Florence Beatrice Smith à Little Rock, en Arkansas, en avril 1887, elle commence le piano avec sa mère, avant d’être inscrite au New England Conservatory of Music à Boston, où elle étudie le piano, l’orgue et la pédagogie musicale, en plus de prendre des cours de composition à titre privé avec George Chadwick, qui sera longtemps son mentor. De retour dans son Deep South natal, elle enseigne un temps à Little Rock et à l’Université Clark à Atlanta, réservée aux Afro-Américains, mais, entre autres vexations, on lui refuse l’adhésion à l’Arkansas Music Teachers Association. En 1912, elle épouse l’avocat Thomas J. Price, dont elle gardera le nom même après leur divorce en 1931.
La famille s’installe bientôt à Chicago, dans un climat social et artistique plus favorable, et sa Première Symphonie est créée en 1933 par l’Orchestre symphonique de la ville, première du genre par une compositrice afro-américaine à être interprétée par un orchestre majeur du pays.
Price est très active, notamment au sein de la National Association of Negro Musicians, reçoit quelques distinctions, mais peine néanmoins à faire jouer ses compositions, au moins autant du fait de son sexe que de sa couleur de peau… Son œuvre est abondante et couvre tous les genres et, bien que relevant de la tradition postromantique européenne – on y décèle l’influence de Dvořák –, puise abondamment dans les spirituals – Leontyne Price et Marian Anderson, notamment, chanteront ses arrangements – et montre une sensibilité toute personnelle.
Commandée en 1938 par le Works Progress Administration’s Federal Music Project, associé au New Deal, la Troisième Symphonie en do mineur de Price emploie moins de matériau folklorique afro-américain, mais plus habilement, que la Première. Après une entrée en matière aux cuivres presque wagnérienne, son premier mouvement expose brièvement un thème impétueux, qui alterne avec des passages plus lyriques auxquels participent tous les pupitres. L’Andante ma non troppo mêle un traitement très romantique à des réminiscences de spirituals. La Juba qui suit est une danse des anciens esclaves venus d’Afrique, avec rythme syncopé, sauts, tapements et claquements de mains – on leur avait interdit l’usage des tambours –, que Price traite de façon plutôt souriante, avec des percussions rares et colorées. Et la Symphonie se conclut sur un Scherzo joyeux et enlevé.
© François Filiatrault 2023