Drei gemischte Chöre (Trois pièces pour chœur mixte)
Clara Schumann
1819 – 1896
Clara Wieck reçoit ses premières leçons de piano de son père, qui aspire à faire de sa fille une concertiste de premier plan – et elle fut, à n’en pas douter, une des plus grandes pianistes de son siècle. Elle tombe bientôt amoureuse du jeune Robert Schumann, aussi élève de son père et de neuf ans son aîné. Peu après l’avoir épousé, en 1840, contre l’avis paternel, elle doit mettre un frein à sa carrière, qui avait fort bellement débuté, car pour Robert, « être mère doit être sa principale mission » – le couple aura huit enfants.
Clara Schumann donnera néanmoins quelques récitals, surtout d’œuvres de son mari, mais elle ne reprendra véritablement sa carrière qu’après la mort de ce dernier, en 1856. Elle sera pendant près de quarante ans formidable pédagogue et interprète d’exception du grand répertoire romantique allemand. Et, plus important aujourd’hui, elle laisse une cinquantaine de remarquables compositions, principalement des lieder et des musiques chambre et de piano.
C’est à Dresde, où le couple s’était établi, que Clara compose en 1848, sur des textes d’Emanuel Geibel, ses Drei gemischte Chöre (Trois chœurs mixtes). Destinés au Chorgesangverein de la ville, fondé en janvier de cette même année par Robert Schumann, ils sont d’abord donnés, a cappella, lors d’une aubade surprise le 8 juin pour marquer l’anniversaire de celui-ci, et ils seront repris le 13 septembre pour Clara elle-même, dans les mêmes circonstances. Dans un traitement harmonique d’une suave plénitude, tous trois montrent une texture homophone, avec de rares entrées en imitations. Abendfeier in Venedig (Fête du soir à Venise) est une prière à la Vierge toute de délicatesse, Vorwärts (En avant !) enjoint à ne jamais désespérer – un poème qui revêtait peut-être pour Clara une signification particulière –, un bref unisson revenant à la fin de chaque strophe pour se donner du courage. Enfin, Gondoliera (La gondole) exploite un dérivé du thème de la nuit, où la quiétude et la lune sont complices des amants…
© François Filiatrault 2023