[inaudible] (création)
Keiko Devaux
Née en 1982
Avec [INAUDIBLE], Keiko Devaux poursuit son cycle d’œuvres explorant la mémoire sonore et l’imagination auditive. L’intérêt que la compositrice porte à la façon dont un son peut être transformé ou modifié dans les souvenirs est en lien avec son processus compositionnel, au cours duquel elle explore fréquemment des gestes mélodico-harmoniques et rythmiques abstraits issus de sa mémoire.
L’œuvre s’inspire de l’effet produit par des bruits blancs dérivés du « manque de signal » de la radio, de la télévision, ainsi que par le son des balayages et des bips des signaux de balayage. Les tensions de l’œuvre proviennent non seulement des réminiscences contrastées de ces différentes sources sonores, mais aussi de la recherche de celles-ci. Les souvenirs épisodiques de divers sons ressurgissent et, mis en boucle, ils se déforment. S’interrompant, se superposant, se fondant les unes dans les autres ou occupant tout l’espace, les évocations des bruits sont exprimées soit par l’orchestre, soit par une section instrumentale ou un soliste.
L’orchestre tisse de longues toiles de mondes sonores flous, entrecoupées de brefs éclats et de fragments denses de souvenirs souvent opposés. Telles des plaques tectoniques de la mémoire, ces couches évoluent tout au long de l’œuvre, se disputant parfois le premier plan pour finalement culminer dans une cohésion sonore momentanée. Tout l’intérêt de l’œuvre repose non pas sur la citation, mais sur l’exploration de l’acte de remémorisation lors duquel la compositrice utilise des événements audibles anciens pour construire, par équivalence, des éléments structurels, harmoniques et stylistiques.
« Le titre [INAUDIBLE] provient de mon projet parallèle de collecte de sous-titres de films qui décrivent le son. Le terme “inaudible” est courant et fascinant pour moi ; l’idée de décrire le son de quelque chose que l’on ne peut pas entendre est magnifique pour moi. Elle évoque à la fois tout et rien. » — Keiko Devaux
© Florence Leyssieux 2023