Aus Italien

Strauss

1864 – 1949

Aus Italien s'ouvre sur un Andante intitulé « À la campagne » (Auf der Campagna), qui sert d'introduction au poème symphonique. On assiste tout d'abord au lever du soleil – Strauss reprendra l'idée en l'amplifiant considérablement dans sa Symphonie alpestre. Suivent diverses impressions de la campagne avoisinante de Rome, qui a inspiré tant de peintres, et l'évocation de certains lieux, comme la Villa d'Este.  

C’est dans les ruines de Rome (In Roms Ruinen) que le voyageur est ensuite transporté. Le caractère éclatant et martial de la musique, qui évoque les splendeurs de la Rome impériale, porte en lui des couleurs annonciatrices de Don Juan et de Till Eulenspiegels. Dans « Sur la plage de Sorrente » (Am Strande von Sorrent), Strauss parvient à évoquer le vent, le bruit des vagues et le chant des oiseaux, mais par-dessus tout la dolcezza typiquement italienne. Enfin, le voyageur est entraîné de manière irrésistible sur les flancs du Vésuve au cœur de la vie populaire napolitaine (Neapolitanisches Volksleben). On reconnait sans peine la chanson Funiculì funiculà, que Strauss prit naïvement pour une mélodie folklorique. Mal lui en prit, car Luigi Denza, le compositeur de cette chanson, lui intenta un procès… qu’il gagna!    

La naissance d’un nouveau genre 

Richard Strauss fait partie des compositeurs qui ont popularisé le genre du poème symphonique, composition orchestrale tirant son inspiration d’un élément extramusical comme un texte ou un personnage. Le genre se rapproche donc de la musique à programme, un type d’œuvres plus descriptif suivant une trame narrative précise. Toutefois, Strauss refuse catégoriquement que ses poèmes symphoniques soient qualifiés de musique à programme, un terme qu’il associe au kitsch et au pittoresque. Pour lui, l’inspiration poétique comptait avant tout. Il parlait donc toujours de poème ou de fantaisie symphonique.   

C’est lors d’un voyage à Venise, plus précisément au couvent de Saint-Antoine de Padoue, que Strauss raconte avoir eu l’inspiration des premiers thèmes de Don Juan, qu’il compose en 1888-1889. Deux ans à peine se sont écoulés depuis Aus Italien et Strauss, âgé de seulement 24 ans, s’impose avec ce deuxième poème symphonique comme un virtuose de l’orchestre. Inspirée de l’histoire du personnage mythique, l’œuvre est basée sur une pièce inachevée de Nicolas Lenau de laquelle Strauss extrait certains vers, qu’il cite dans sa partition.  

Trois parties composent l’œuvre. La première, qui décrit la vigueur et l’impétuosité du héros, est remplie d’élan et de couleurs orchestrales irrésistibles. Suit une section qui décrit les conquêtes du séducteur et où se succèdent plusieurs thèmes amoureux, joués notamment au violon et au hautbois. La dernière section introduit la mélancolie et annonce la mort du personnage; lassé de sa vie et souhaitant presque en finir, celui-ci affronte en duel le père vengeur d’une de ses conquêtes et succombe. Don Juan est créé le 11 novembre 1889 à Weimar sous la direction de Strauss lui-même. L’accueil est triomphal et propulse le compositeur comme chef de file de l’école moderne.